Apollo (Dream in a cave), Max Beckmann, 1942

© Max Beckmann
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                                                                                                                                        Un homme prénommé Max a emprisonné l’un de ses rêves dans un tableau, enverré et circonscrit à une image complexe et ambiguë. Il doit, je crois, être question de questions et de pulsions. Mais ça reste à voir, de vos yeux, de votre angle mental. J’y perçois, pour ma part tranchée, l’infernal ennui, la tentation divine, le mordoré des cages sensuelles et, surtout, de la musique ! Musique à faire chialer, rire et se repentir de toutes nos fautes qui n’en sont pas et dont nous ne pouvons, par nature, pas être responsables. En somme, j’y vois la religion des faibles faite partition. Ce que d’aucuns considèrent comme vice n’est pas non plus absent de la composition. Sans juger de rien, incarnant ainsi la seule justice authentique, je me détache de toutes ces idées de notion. Extra terrestre, j’entre dans la cave du propriétaire, ne dérange rien, ne pose aucune question. Pas un seul mot d’ailleurs ne sort ni n’entre. J’apprécie mon calme et mon recul splendidement inétudié ! Un idiot n’y verrait pas moins que moi, ne toucherait pas moins à l’ahurie perfection. L’endroit se laisse, il est vrai, explorer avec une complaisance quasiment suspecte, voire inquiétante. La femme à la lascive attente n’explique pas tout, elle n’explique même rien, soyons clairs ! La jaune étreinte non plus, ni la torche menaçante, pas plus que le puits aux vertus sans fin ni le début d’un dédale menaçant, les chaînes, le caractère inévitable de la sentence collective. Non, pas d’indices, pas de solution, aucun mystère. Il s’agit d’un rêve, je le répète, rêve nettement flou, le cliché, l’instant fugace d’un soi ineffable et cependant pénétrable dans la mesure de notre incapacité à chercher. Pour moi, ce sera le terrible refuge d’un solitaire volontaire, acharné à recommencer sans cesse un travail désespérant de beauté, mais heureusement enivrant. Ce sera aussi le danger sciemment poursuivi, l’image mise en abîme afin de s’approcher de la frayeur la plus banale et néanmoins la plus terrifiante.

 

                                              © AG